Dans son chef d’œuvre Central Park, peint en 1965, Pierre Alechinsky introduit pour la première fois ce qui va devenir l’un de ses signes de reconnaissance : les marges. Le peintre entoure le sujet central de motifs narratifs avec une sorte de prédelle qui le complète et l’explique. Ces « remarques marginales », souvent en noir en blanc, peuvent également n’apparaître que dans le registre inférieur de la composition.

Pierre ALECHINSKY
Central Park, 1965
Acrylique sur papier marouflé sur toile
avec remarques marginales à l’encre de Chine 
162 x 193 cm
Collection de l’artiste

Le tableau Et mon Bureau ?, a été peint entre 1990 et 1993 dans un esprit expressif post CoBrA. Il se compose de deux toiles distinctes et jointes. Une partie supérieure où la composition est de taille nettement plus importante et une partie inférieure où les remarques marginales reprennent des fragments de l’image centrale. 
Au moyen de ce « diptyque », l’artiste crée une dialectique assez complexe entre le sujet central, coloré, foisonnant et la prédelle en noir et blanc, découpée et ordonnée en suite d’images. Ces petites saynètes faites à l’encre de chine complètent le sujet principal et forment un écho en négatif jouant sur la répétition et le dédoublement de l’image. 
La grande composition quant à elle, semble plus spontanée, le geste pictural est exubérant est libre, la palette à l’acrylique est explosive et traduit une forte énergie. 

Pierre Alechinsky lui-même s’est exprimé sur son processus créatif qui, pour Et mon Bureau ?, lui aura pris trois années : « Le centre terminé, je m’offre un répit, je me laisse flotter, ou je passe à d’autres travaux ; hiatus qui prend plusieurs jours avant de m’activer à la périphérie, plusieurs semaines ou mois, dans les cas exceptionnels jusqu’à plusieurs années. Ni horaire, ni obligation. En tout cas, j’observe le centre avant de me lancer dans les marges. »